Tout le monde parle du stress comme d'une maladie. C'est loin d'en être une. Grâce à 70 ans de recherche, on sait aujourd'hui qu'il s'agit d'une formidable réaction de l'organisme pour s'adapter à l'environnement. Dès qu'une personne se trouve dans un environnement difficile, le stress opère dans le corps par la libération de substances chimiques, mais aussi dans le psychisme par la libération d'émotions. C'est donc une réaction normale et utile.
Le stress au travail semble avoir fortement augmenté ces dernières années. Pour le Conseil Economique et Social qui vient de publier un rapport sur les nouveaux risques pour la santé des salariés, la faute incombe aux nouvelles organisations du travail. La mondialisation, et la concurrence qui l'accompagne seraient ainsi en ligne de mire. Selon ce rapport, le travail est de plus en plus intense et les marges de manoeuvre de plus en plus restreintes. Au rang des causes du stress : un isolement croissant des salariés et une disparition d'une organisation plus collective.
Il est difficile de donner un chiffre précis : le coût du stress global doit additionner le coût professionnel et celui dû aux hasards de la vie. Ces chiffres sont notamment calculés par rapport au manque de rendement et l’absence au travail, aux accidents dus au stress et aux coûts des maladies liées à ce fléau. En France par exemple, le coût du stress professionnel seul est estimé à 51 milliards d’euros, selon le syndicat des cadres. Il n’existe pas de données sur le stress global en France où 44 % des habitants et 70 % des cadres se plaignent de ce fléau. Mais si on prend en considération des chiffres calculés au Royaume Uni, on atteindrait environ 10% du produit intérieur brut (PIB) du pays.
Selon les travaux de la Fondation Européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail, il existe de profondes différences en matière de stress, selon le métier et le domaine d'activité. Ainsi, les moins stressés en Europe sont les ouvriers, employés… et militaires ! A l'autre bout de l'échelle, on trouve les techniciens, cadres et scientifiques. 30 à 40 % d'entre eux ressentent un stress quotidien dans leur emploi. Une tendance confirmée par un sondage du Figaro Entreprises et de la Confédération Française de l'encadrement réalisé en avril 2004. Selon cette enquête, les cadres ont majoritairement l'impression que leur charge de travail est plus lourde, qu'ils doivent travailler plus vite, et que leurs efforts ne sont pas reconnus à leur juste valeur… Une autre enquête, réalisée par l'Usine nouvelle et le cabinet Stimulus en février 2004, souligne la plus grande pression dont sont victimes les femmes. Mais apparemment cette tendance serait en train de s'inverser…
Aujourd'hui, il existe une véritable prise de conscience des menaces qui pèsent sur la santé mentale des salariés. Ainsi, de nouvelles lois ont été votées, telle que la reconnaissance du harcèlement moral (en 2002). De même, l'employeur a obligation de faire de la prévention en matière de santé physique mais aussi mentale. Enfin, de nombreux cabinets de coaching et autres organes de formation se sont spécialisés dans la gestion du stress en entreprise. Ils rencontrent un succès grandissant. Car les dirigeants l'ont bien compris, chasser le stress est essentiel pour la santé des salariés… et de l'entreprise !
Face à certaines situations, le stress peut être positif. Quand une situation représente un enjeu important, le stress permet à l'individu de maintenir une sensation de contrôle. Mais le stress devient négatif lorsque ce même individu a le sentiment d'être débordé. Or, aujourd'hui, c'est une fonction de plus en plus sollicitée dans le travail, elle ne peut plus se mettre au repos. Les sources de stress professionnel sont devenues omniprésentes et davantage psychologiques avec, par exemple, le culte de la performance, les incertitudes ou les relations conflictuelles. Le changement est permanent, on en demande toujours plus .D' où l'impression de donner beaucoup mais de ne rien recevoir, de ne pas être reconnus socialement par leurs supérieurs ou même leurs clients. A cette situation s'ajoute le techno stress, c'est-à-dire un stress lié à l'utilisation des nouvelles technologies.
Toutes les catégories professionnelles sont touchées par le stress. Pour les ouvriers et employés, le stress peut se transformer en maladie ou en accident. Ces salariés disposent de peu d'autonomie et doivent parfois mettre en application des ordres auxquels ils n'adhérent pas. Ils sont ainsi pris dans des conflits de valeur et négligent les facteurs d'hygiène ou de sécurité. Les cadres et managers sont aussi concernés par le phénomène mais doivent, en plus, gérer le stress des autres. Ils sont donc surtout victimes du stress psychologique.
D'après les conclusions de l'Organisation internationale du travail, du ministère du Travail américain et de l'Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail, la lutte contre le stress doit se faire à plusieurs niveaux. Il faut tout d'abord repenser toute l'organisation du travail. Aujourd'hui, tout se traite dans l'urgence avec comme valeur extrême la performance absolue. Le management est aussi à revoir. Les cadres doivent comprendre qu'ils n'ont pas que des aspects stratégiques à gérer, mais aussi le stress d'une équipe. Il faut les sensibiliser à ce thème. Pour limiter le stress, les managers peuvent donner plus de moyens à leur équipe, être plus humains, valoriser les individus, donner du sens à leur travail, diversifier les tâches, laisser de l'autonomie... Enfin, la lutte contre le stress se joue également à l'échelle de l'individu. Chacun d'entre nous possède des ressources pour être plus résistant au stress. Apprendre à gérer son propre stress est important pour sa santé et aussi son efficacité au travail.
Physiquement, cela passe par des techniques de relaxation : détendre ses muscles, avoir une respiration abdominale… Psychologiquement, il faut éviter le développement de certains raisonnements anxieux ou catastrophistes. Ce qui compte, ce n'est pas l'événement mais l'idée qu'on s'en fait. Il faut savoir prendre du recul. D'un point de vue comportemental, le stress provoque généralement le combat ou la fuite, c'est ce qu'a montré Henri Laborit dans ses expériences avec des rats (Ndlr : voir le film "Mon Oncle d'Amérique" d'Alain Resnais). Pourtant, on peut aussi exprimer sa colère sans attaquer mais en parlant calmement, sans brutalité. Il faut également savoir se protéger. Cela signifie avoir une bonne hygiène de vie : faire du sport, bien manger, dormir… Enfin, et c'est peut-être le plus important, il faut cultiver les émotions positives en vivant de bons moments, en riant et en s'entourant socialement .
Le bruit
Les recherches démontrent de plus en plus que le bruit ne fait de bien à personne. Il commence pour beaucoup d'entre nous dès le matin dans les embouteillages et ne s'arrête qu'une fois sortis des embouteillages du soir. Si vous devez en plus travailler dans un environnement bruyant, il est normal que vous souffriez d'un certain stress. Un des témoins de cette nuisance est le tourisme. Les gens recherchent de plus en plus des endroits inhabités où ils peuvent se remettre de la vie quotidienne dans le calme.
L'éclairage
Trop ou trop peu d'éclairage sont également négatifs pour le travail. Par éclairage, nous entendons également la luminosité de l'écran d'ordinateur qui peut être trop fort ou trop faible et peut ainsi provoquer des problèmes.
La température
Beaucoup d'entreprises sont aujourd'hui équipées d'un système d' air conditionné sophistiqué. Cependant, la mise au point du système pose souvent problème. On ne peut pas obliger les gens à subir un courant d'air constant ni les obliger à s'habiller très légèrement à cause de la chaleur. Sans air conditionné, les gens subissent une surcharge supplémentaire lors de vagues de chaleur.
Les risques professionnels
Les personnes qui risquent leur vie tous les jours ou qui risquent une infection par des produits chimiques ou nucléaires souffrent bien sûr d'une tension de travail accrue. Si en plus les mesures de sécurité ne sont pas satisfaisantes, la situation devient catastrophique.
L'ergonomie
Les personnes qui passent la journée devant un ordinateur rentrent souvent chez eux avec des maux de tête ou de nuque. La position de travail a donc son importance lorsque l'on traite de stress. Garder une même position ou faire des mouvements répétitifs sont une chose néfaste pour votre corps.
Le personnel
Certains secteurs souffrent d'un manque cruel de personnel, obligeant certains employés à effectuer le travail pour deux (ou plus). Les secteurs concernés actuellement sont le secteur des soins de santé, de l' enseignement et le secteur informatique.
Le travail irrégulier
Le travail en week-end, le travail de nuit et les heures supplémentaires sont également des causes de stress. Un secteur qui est souvent confronté à ce genre de situations est le secteur des soins de santé. Si une infirmière fait la garde de nuit toute la semaine et doit en plus, par manque de personnel, s'occuper des gardes des deux week-ends consécutifs, vous imaginez les conséquences. La vie familiale et le temps libre en pâtissent aussi. Les horaires "flexibles", c'est-à-dire qui peuvent changer à tout moment de la journée ou de la semaine, sont également des facteurs de stress. Dans les cas les plus extrêmes, il se peut que vous n'entrepreniez plus rien d'autre que d'attendre un coup de fil de votre employeur chez vous.
La rémunération
Un salaire trop bas n'améliorera pas votre appréhension du travail. Il a de plus été démontré que les rémunérations à la prestation ou à la commission ne sont pas du tout bénéfiques. Ceci peut paraître étrange puisque ces systèmes ont été inventés pour motiver les gens. L'effet est néanmoins inverse : les gens se sentent mis sous pression pour prester le plus possible.
Le manque de perspectives
Votre travail n'offre pas la moindre perspective de promotion? Ou ne pourrez-vous même jamais changer de département? Vous courrez le risque d'aller travailler avec des pieds de plomb et de voir apparaître des signes de stress .
Tous ces éléments sont signe de mauvaises relations sociales. Ils ne faciliteront pas vos journées de travail et vous constaterez que les personnes qui subissent de telles conditions finissent par ne plus supporter la pression.
Nous pouvons donc en déduire que le stress n'est pas une maladie qui n'affecte que les chefs d'entreprise. En effet, les directeurs ont souvent des délais très courts et beaucoup de travail, mais ils peuvent en général décider eux-mêmes de leurs horaires. Ils ne dépendent pas du rythme de travail de quelqu'un d'autre. De plus, ils ont la possibilité de déléguer, ce qui n'est pas le cas des employés normaux.
Le contenu de votre travail participe à votre taux de stress. Votre travail est-il trop difficile? Vos délais sont-ils trop courts? Devez-vous faire la même chose tout le temps? Votre chef vous donne-t-il des instructions mais sans jamais dire concrètement ce qu'il attend de vous? Dans ces cas, vous courez le risque d'être stressé.
Le stress trouve aussi ses origines dans des facteurs individuels et subjectifs. Comment expliquer sinon que de deux personnes effectuant le même travail au même endroit et dans les mêmes conditions de travail, seulement une souffre de stress ?
Tout le monde ne subit pas le stress dans la même mesure. Les éléments personnels jouent un rôle décisif. Quelques exemples :
Signes physiques : maux de tête, grincement des dents, mâchoire contractée, douleur thoracique, souffle court, battement précipité du coeur, pression artérielle élevée, douleurs musculaires, indigestion, constipation ou diarrhée, transpiration accrue, fatigue, insomnie, maladies fréquentes
Signes psychologiques : anxiété, irritabilité, tristesse, attitude défensive, colère, sautes d'humeur, hypersensibilité, apathie, dépression, processus de réflexion lent ou pensées affolées, état de détresse, de désespoir ou sentiment d'être coincé.
Signes liés au comportement : boulimie ou anorexie, impatience, rapidité à argumenter, renvoi au lendemain, consommation accrue d'alcool ou de drogues, consommation accrue de la cigarette, isolement des autres, négligence des responsabilités, mauvais rendement, mauvaise hygiène personnelle, changement dans les pratiques religieuses, changement dans les relations familiales.