L'autocontrôle, mode de fonctionnement où chacun, à son niveau, contrôle la qualité de son travail, répond aux exigences de la partie 4. 10. 3 " Contrôles et essais en cours de réalisation " des normes ISO 9001/2 (voir le module " Construction production ") partie 1 : " Que demande la norme ").
Si vous préparer une certification ISO 9003, les contrôles et essais en cours de fabrication ne sont pas exigés Cependant, rien ne vous empêche de mettre en place l'autocontrôle pour améliorer votre qualité et peut-être vous préparer à une extension vers une certification ISO 9001 ou ISO 9002. Il est évident que l'autocontrôle implique une organisation adéquate. Que vous soyez responsable qualité, responsable de production ou tout simplement désireux de mettre en place l'autocontrôle dans votre service ou secteur, ce dossier vous décrit les 3 étapes nécessaires à la mise en place de cette démarche. A condition bien entendu que vous soyez une entreprise industrielle, principale consommatrice d'autocontrôle (mais les services s'y mettent peu à peu…)
Apportez un soin tout particulier à cette phase de préparation , elle conditionne la réussite de la démarche. Cette première étape consiste à un " état des lieux " approfondi de votre entreprise avant de décider d'une quelconque démarche . Cette analyse permet de mettre à jour les différentes résistances qui pourraient faire obstacle à la mise en œuvre de l'autocontrôle : des résistances d'ordre technique, économique ou humaine.
L'autocontrôle classique reposant sur la vérification par l'opérateur lui-même de sa propre production, la mise en place de cette démarche sera plus facile si votre processus de fabrication est constitué de multiples opérations individuelles. Ici, chaque opérateur est responsable de la qualité des pièces qu'il fournit à l'opération suivante . C'est généralement le cas par exemple, de la production de pièces mécaniques .
Dans le cas d'un processus continu (industries chimiques, par exemple) la mise en place de l'autocontrôle est moins aisée. En effet, on ne peut ici contrôler la conformité du produit qu'en sortie de machine. Le dernier opérateur pourrait donc être considéré comme un contrôleur par les autres opérateurs travaillant sur la machine. Cependant, l'autocontrôle peut porter non plus sur les caractéristiques du produit, mais sur les paramètres du processus permettant d'obtenir un produit conforme (pour garantir la bonne cuisson d'un gâteau, on peut s'assurer de la bonne température du four et du temps de cuisson). Dans ce cas, l'ensemble des opérateurs redeviennent impliqués dans la maîtrise de ces paramètres.
Forcément, comme toute démarche, l'autocontrôle a un coût :
Le but principal de l'entreprise étant le profil, vous devez justifiez du point de vue économique le bien-fondé de la démarche en comparaison avec un contrôle final unique, voir même pas de contrôle du tout. Pour cela, dans chacun des cas les coûts de prévention (autocontrôle, tri structure qualité …) aux coûts de réparation (retours clients, rebuts, retouches, perturbations…). Attention cependant, il est très difficile de chiffrer économiquement l'insatisfaction d'un client. Mais celui-ci risque de passer à la concurrence, entraînant avec lui certains confrères (problème d'image de marque).
Nous serons tous d'accord pour admettre qu'en très grande majorité, chacun à son poste a envie de bien faire. Cette remarque inclut bien évidemment les opérateurs. Comme nous l'avons vu plus haut, l'autocontrôle repose sur la responsabilisation des opérateurs. Cette prise de responsabilité se fait d'autant plus facilement que les opérateurs ne sont pas considérés comme des instruments de travail, mais comme des êtres doués de raison. Si la communication entre les différents niveaux de votre entreprise passe bien, si le mode de management participatif est de rigueur, si la délégation fait partie des outils promus par la direction, vous êtes sur un terrain favorable à la mise en place de l'autocontrôle. Dans le cas contraire, les opérateurs à qui jamais personne n'a demandé leur avis risquent de refuser cette prise de responsabilité. L'autocontrôle peut alors complètement désorganiser l'entreprise.
Si l'état des lieux ne relève pas de contre-indication notoire (problème de communication au sein de votre entreprise, processus continu…), vous pouvez décidez de vous engager dans une démarche d'autocontrôle. Cette décision stratégique doit émaner de la direction
La décision prise, il va maintenant falloir définir le mode de mise en place. Pour mettre toutes les chances de réussite de votre côté, la constitution d'un groupe de travail chargé de lancer la démarche s'avère la technique la plus efficace. Ce groupe, constitué de 6 à 7 personnes opérationnelles, directement concernées par la mise en place de l'autocontrôle, doit comprendre au moins une personne ayant autorité pour prendre des décisions. En fonction des secteurs, le groupe peut être constitué : - du chef d'atelier,
Les techniques et outils liés au travail en groupe sont détaillées dans le guide outil " résoudre un problème ".
Pour éviter une trop grande dispersion des énergies, procédez par atelier, ligne de produit ou secteur. Cette tactique permet également de réajuster rapidement certains points particuliers. A ce stade, 2 écoles s'affrontent pour choisir le terrain d'expérimentation :
L'autocontrôle entraînant une modification importante de la façon de travailler, il est très important d'expliquer vos intentions à l'ensemble du personnel, d'être transparent. Dites ce que vous allez faire, et faites ce que vous avez dit. Expliquez comment l'opération va se dérouler, pourquoi tel secteur a été choisi plutôt que tel autre, etc… La population des contrôleurs peut se sentir menacée lorsque l'on parle d'autocontrôle. Si la mise en place de l'autocontrôle se traduit par une diminution du nombre de contrôleurs, indiquez clairement la politique qui sera suivie :
Le but de l'autocontrôle étant de satisfaire votre client en visant le " zéro défaut ", définissez-vous l'indicateur le plus représentatif de la qualité produite (qualité que recevrait votre client s'il n'y avait pas de contrôle final). Cet indicateur pourrait être :
Pour vous aider à créer cet indicateur, reportez-vous au dossier thématique " Indicateurs ". Comme tout indicateur de performance, celui-ci doit être associé à un objectif chiffré en montant et date (exemple : passage à 5% de non-conformes avant décembre 2001). En fin de démarche, il vous permettra de mesurer l'efficacité de la mise en place de l'autocontrôle dans votre entreprise.
Le contrôle qualité n'amenant aucune plus-value vendable à votre production, limitez le nombre de caractéristiques suivies. Elles peuvent être :
Les moyens de mesure que vous allez mettre en place doivent également être adaptés à la caractéristique que vous voulez mesurer et à sa tolérance associée. Cette notion est tellement évidente qu'elle constitue une exigence des normes ISO 9001 /2 /3 (chapitre 4.11 " Maîtrise des équipements de contrôle, de mesure et d'essais "). On l'appelle : capabilité de l'instrument de mesure. Cette capabilité ne doit être ni trop élevée (sur-qualité), ni trop faible (sous-qualité). Ainsi, ne mesurera-t-on pas la surface d'un champ avec un réglet, ni la cote d'une pièce de micromécanique avec un décamètre !
Suivant que vous fabriquiez des produits de façon unitaire, en petite ou grande série, vous n'utiliserez pas la même méthode d'autocontrôle. IL existe 3 grandes méthodes d'autocontrôle :
Dans cette méthode, l'opérateur contrôle l'ensemble de sa production. Cette méthode présente un avantage théorique évident : si elle est utilisée à tous les stades de la fabrication, aucun produit défectueux ne doit arriver chez le client. Cependant, aucun filtre n'étant parfait, il arrive parfois qu'un produit non-conforme passe au travers des mailles du filet. Par exemple, lorsque vous écossez des petits pois, la monotonie du geste aidant, il vous arrive forcément de mettre une cosse avec vos pois ! Revers de la médaille : son coût. En effet, il n'y a aucune différence entre une pièce contrôlée bonne et une pièce bonne non contrôlée. Le contrôle, qui coûte cher, n'amène donc aucune plus-value vendable à la pièce et on contrôle toutes les pièces ! Cette méthode est donc utilisée dans le cas de productions unitaires ou en petites séries (proches de l'artisanat) ou dans la production de pièces de sécurité, dans le nucléaire ou le spatial, par exemple, où les séries sont généralement très petites et où la moindre non-conformité peut engendrer des conséquences catastrophiques.
Dans cette méthode, l'opérateur contrôle une partie de sa production. Si celle-ci est correcte, il considère que l'ensemble de sa production est bonne. L'avantage par rapport à la méthode précédente est un coût de contrôle moins élevé. Cependant, le risque théorique de laisser passer des produits non-conformes n'est plus nul. Il croît de façon inversement proportionnelle au nombre de pièces contrôlées (si vous ne contrôlez qu'une pièce sur 100, la probabilité de tomber sur une pièce mauvaise est plus faible que si vous en contrôlez 99). De plus, pour être efficace, le prélèvement des pièces de l'échantillon doit être aléatoire (pièces tirées au hasard) alors que pour bon nombre d'entreprises, le contrôle des premières pièces sorties de la machine valide tout le lot.. Vous allez obtenir des résultats mais vous ne pourrez absolument pas chiffrer de façon statistique la proportion de produits non-conformes qui risquent d'aller chez votre client. Avec cette méthode, il est également très difficile de faire des prévisions . En effet, vous ne pouvez savoir à priori si votre lot sera validé ou rejeté. Réservez donc cette méthode pour contrôler les lots de vos fournisseurs en entrée (contrôle d'entrée) et pour valider les lots de produits finis que vous fournissez à vos clients (contrôle final).
L'avantage de cette méthode, également appelée SPC de l'anglais statistical Process Control, est d'être préventive. Elle concerne surtout les fabrications de moyenne ou grande séries. Cette méthode permet d'agir sur le processus avant même que le défaut ne soit fabriqué. Grâce à la carte de contrôle, l'opérateur reçoit une information immédiate et objective sur la performance du processus qu'il pilote. En effet, le suivi de la moyenne d'un petit échantillon prélevé régulièrement dans la production permet de mettre en évidence des éventuelles dérives d'une caractéristique (le diamètre de perçage d'un trou qui grandit par exemple). En calculant l'étendue de cet échantillon (différence entre la plus petite pièce et la plus grande), l'opérateur peut suivre la dispersion de sa production et peut ainsi mieux comprendre et maîtriser son processus. L'opérateur est alors le réel pilote de son processus. Analysant directement et rapidement l'information donnée par la carte de contrôle, il peut agir sur le processus pour éviter qu'une non-conformité n'apparaisse ou ne s'aggrave. De plus, en cas de problème, il peut faire une première analyse pour comprendre les causes du dysfonctionnement. Cette méthode est donc très performante dans la quête du zéro défaut car elle permet de s'attaquer à un problème avant même qu'un défaut n'apparaisse. Cependant, comme toute méthode, la MSP n'est pas parfaite. En effet, les cartes de contrôle présentent 2 risques (plus ces échantillons sont importants, plus les risques sont faibles) : - le risque de ne rien faire alors que votre processus et en train de se dérégler avec risque d'apparition de non-conformité, - le risque de procéder à un nouveau réglage alors que votre processus n'a pas évolué. La MSP n'est pas une méthode pour améliorer les performances intrinsèques d'un processus . Elle est par contre excellente pour maintenir un processus jugé bon dans les mêmes niveaux de performances. Aussi, appliquez cette méthode à un processus connu et stabilisé, aux niveaux de conformité et performances acceptables
Maintenant que vous avez défini les caractéristiques que vous allez suivre, les moyens de mesure que vous allez utiliser, et la méthode d'autocontrôle appropriée, vous allez appliquer la méthode sur le terrain en 3 phases :
Dans le cadre de l'assurance qualité, les normes ISO9001/2/3 vous demandent de consigner par écrit les dispositions prises pour satisfaire les besoins de vos clients et les objectifs de votre direction. L'autocontrôle étant une de ces dispositions, vous devez expliciter clairement votre façon de faire dans des instructions. Ces instructions, expliquant aux opérateurs comment ils doivent procéder, doivent intégrer l'autocontrôle comme une opération à part entière. N'hésitez pas à vous reporter au module " Construction production " et au guide outil " Construire le système documentaire " Pour vous aider à élaborer ces instructions. Pour être efficaces, vos instructions doivent être schématiques et adaptées à l'opérateur. Elles doivent de plus être conformes aux dispositions prises pour maîtriser vos documents : rédaction, vérification / approbation, gestion (diffusion, classement, archivage des documents périmés…).
La mesure des résultats issus du contrôle doit faire l'objet d'enregistrement, pour 2 raisons :
Elle est primordiale pour impliquer l'ensemble des acteurs de l'entreprise. Par une formation préalable adaptée, les opérateurs atteindront le niveau de connaissance nécessaire à la réalisation de l'autocontrôle.
La formation doit s'effectuer en 2 temps :
Les opérateurs formés, vous devez aborder leur qualification, étape importante dans la mise en œuvre de l'autocontrôle car vous officialisez ici la délégation du contrôle. La qualification d'un opérateur signifie que celui-ci a assimilé la formation, qu'il maîtrise le ou les moyens de contrôle mis à sa disposition, qu'il sait enregistrer les résultats de ses mesures et qu'il a une connaissance suffisante des actions qu'il doit mener s'il détecte une non-conformité. Cette qualification doit être enregistrée dans le dossier individuel de l'opérateur (voir le module " Construction formation ").
Avant de généraliser l'autocontrôle sur l'ensemble de votre entreprise, effectuez le bilan de la mise en place sur votre zone test. Attendez cependant quelques mois avant de tirer des conclusions. Laissez le temps à votre système de se stabiliser avant de produire ses premiers résultats positifs. Pour vous rendre compte de la maturité de votre système, suivez l'évolution de votre indicateur de performance. Lorsque votre indicateur devient stable, vous avez atteint le bon degré de maturité. Vous pouvez alors comparer la valeur de cet indicateur à l'objectif que vous vous êtes fixé et, s'il y a adéquation, généraliser la démarche. Les différents exemples de mise en place de l'autocontrôle dans les entreprises ont montré que cette démarche pouvait abaisser les coûts dus aux rebuts et retouches à 60 et même parfois 90%. Mais il n'existe pas de recette miracle, votre entreprise est unique, vous devez trouver la solution qui lui convienne. Comment optimiser l'autocontrôle ?
En fait, tout dépend de l'opérateur. Pour qu'il assume ses responsabilités il doit savoir :
La clé de la satisfaction des clients, objet des normes ISO 9000, se trouve dans des opérateurs formés, compétents et concernés par la qualité des produits ou services qu'ils produisent. La méthode de l'autocontrôle expliquée ici permet cette responsabilité. Ici l'opérateur vérifie lui-même sa production, encadré par un groupe de travail chargé de lancer la démarche. Ce dossier thématique insiste sur les différentes phases de mise en place (délimitation des zones, définition des techniques, système documentaire) et sur les moyens d'information et de formation mis à la disposition des opérateurs pour bien réussir leur mission.